Frais de mandat : enquête sur 15 élus pour détournements de fonds publics

Le Parisien 12 décembre 2018 – avec AFP –
La Haute autorité pour la transparence de la vie publique soupçonne des détournements de fonds publics chez des députés, après avoir contrôlé la variation de leur patrimoine. LP/Olivier Boitet
L’enquête concerne sept députés et huit sénateurs, anciens élus ou réélus en 2017, dont l’identité n’a pas été communiquée.
Ont-ils abusé de l’argent public ? Quinze parlementaires ou ex-parlementaires font l’objet d’enquêtes préliminaires pour possible usage illicite de leur IRFM, l’ancienne indemnité pour frais de mandat qui n’était pas contrôlée, pour des sommes de 20 000 à 80 000 euros, a-t-on appris mardi de sources proches du dossier.
Soupçonnant des détournements de fonds publics, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) avait transmis au parquet national financier (PNF) les dossiers de ces 7 députés et 8 sénateurs – des anciens élus, certains réélus en 2017 – après avoir contrôlé la variation de leur patrimoine, entre les premières règles d’encadrement de l’IRFM en 2015 et leur fin de mandat en 2017.
Les noms des parlementaires visés n’ont pas été communiqués. La Haute autorité dispose des déclarations de patrimoine des parlementaires pour vérifier notamment s’il n’y a pas eu enrichissement illicite pendant le mandat. Elle avait pointé dans le passé « plusieurs situations » de sortants dont l’IRFM a « contribué à un accroissement sensible du patrimoine », via notamment l’achat de biens immobiliers privés, permanences en particulier.
L’indemnité représentative de frais de mandat (IRFM) a pu aussi être utilisée pour des dépenses personnelles sans lien avec le mandat, des dépenses électorales ou le paiement de cotisations à des partis.
Les versements aux députés contrôlés de près
Les investigations ont été confiées à la brigade de répression de la délinquance économique (BRDE) de la police judiciaire parisienne ainsi qu’à l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (Oclciff).
Après des abus dans le passé (vacances, téléviseur… payés avec l’IRFM), Assemblée puis Sénat avaient édicté en 2015 une liste – très générale — des dépenses autorisées et interdites (dont l’acquisition d’un bien immobilier), et imposé le versement de l’IRFM sur un compte bancaire dédié. Les députés devaient aussi certifier sur l’honneur du bon usage.
Les lois de moralisation adoptées à l’été 2017 ont entraîné une réforme du système début 2018 et un contrôle aléatoire des dépenses.
Les députés disposent désormais d’une « avance » de 5 373 euros mensuels (même montant que l’ancienne IRFM), dont 600 euros peuvent être dépensés sans justificatifs, les sénateurs de 5 900 euros, dont 885 euros sans justificatifs..
Les privilèges qui existent encore
Le régime spécial de retraite. Une économie de 10 millions d’euros par an à terme. Depuis le 1er janvier, les députés ne bénéficient plus d’un régime de retraite spécial. Un principe qui entrera réellement en vigueur quand les députés en fonction feront valoir leur droit à la retraite.
Moins avantageuse depuis une première réforme en 2010, la retraite des députés sera maintenant celle des salariés de la fonction publique. Avant cela, ils bénéficiaient d’une pension à taux plein après 31 ans de cotisations, contre plus de 40 ans pour un salarié classique.
L’allocation-chômage. Autre privilège abrogé début 2018, les allocations-chômage. En cas de défaite électorale, les actuels habitués du Palais Bourbon ont désormais droit à 57 % du salaire journalier pendant 24 à 36 mois, comme les salariés de droit commun. Avant, un ancien député percevait l’équivalent de l’indemnité parlementaire de base pendant six mois (5 600 euros), puis une indemnité dégressive pendant trois mois.
Plus de 5 000 euros mensuels de frais de mandat. Les règles ont évolué… un peu. Depuis le 1er janvier, il ne faut plus parler d’indemnité représentative de frais de mandat (IRFM), mais d’avance de frais de mandat. Les députés ont toujours droit à 5 373 euros mensuels, mais ils doivent maintenant conserver de quoi justifier leurs dépenses de représentation. Chaque année, l’Assemblée contrôlera 120 parlementaires tirés au sort.
Une enveloppe de 18 950 euros par an pour les taxis, le téléphone et le courrier. Avant, ces trois postes étaient divisés en autant de forfaits. Le 5 décembre, les questeurs, en charge du budget du Palais Bourbon, ont décidé de fusionner ces enveloppes annuelles en une seule de 18 950 euros pour financer leurs déplacements en taxi, VTC, leurs frais téléphoniques et de courrier. Il sera donc plus difficile de tracer l’argent des élus.
Chaque député bénéficie également d’une somme de 15 500 euros, 13 000 pour ceux réélus, pour s’équiper en matériel informatique. Cette somme est aussi dédiée à l’achat d’ordinateurs pour leur permanence dans leur circonscription.
Les facilités de circulation. L’Assemblée nationale prend en charge les déplacements en train de ses députés, qui voyagent en première classe. Pour les élus métropolitains, elle peut régler aussi chaque année « 80 passages entre Paris et la circonscription lorsqu’elle est desservie par une ligne aérienne régulière », peut-on lire sur le site de l’institution. Ils ont également droit à 12 voyages aériens hors de leur circonscription. Les élus d’outre-mer disposent de 26 trajets annuels entre Paris et leur circonscription.
Pour les déplacements dans la capitale et en région parisienne, les députés peuvent recourir aux services du parc de voitures de l’Assemblée nationale. Elle possède une douzaine de voitures, avec chauffeur.
Le logement. Il existe plusieurs catégories de députés. Il y a les 242 qui disposent d’un bureau avec couchage. Puis, il y a les élus franciliens et les 51 qui ont accès à la résidence du Palais Bourbon. Reste encore à loger plus de 200 élus. Ces derniers ont une solution simple : la nuit d’hôtel.
Jusqu’à 200 euros la nuit, sans compter le petit-déjeuner et les frais de parking, c’est l’Assemblée qui paie. Depuis le 1er janvier, le député ne doit plus verser 30 euros de sa poche. Pour un élu qui passe trois nuits à Paris dans la semaine, cela représente une économie mensuelle de 360 euros. Enfin, il est également possible depuis le début de l’année de louer un appartement aux frais de l’Assemblée. A condition de trouver une location à moins de 900 euros par mois. Ce qui peut s’avérer moins onéreux que les nuits à l’hôtel.

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