Dans un texte écrit pour le « Monde », la romancière Maryline Desbiolles dénonce les dérives, notamment antisémites faiblement dénoncées, et l’entre-soi du mouvement.
Le Monde 1101/2019 Par Maryline Desbiolles
Article réservé aux abonnés
Tribune. Son tablier de toile blanche est imprégné de sang et lui donne l’allure d’un moine-soldat qui aurait pris sur lui le poids de nos péchés. Cent cinquante-six kilos calés contre son cou et sa tête. Cent cinquante-six kilos, sourit-il, bien qu’il travaille depuis 11 heures du soir, toute la nuit, qu’il est 11 heures du matin, et qu’il gagne le smic. Je croise Omar chez le boucher. Il porte sur l’épaule une carcasse de bœuf qu’il va accrocher aux dents de loup de la chambre froide.
A 3 heures du matin, Omar est passé près du rond-point investi par les « gilets jaunes », il a manqué écraser l’un d’eux, qui visiblement ne marchait plus très droit. De loin, on a invectivé Omar, on a montré les poings, on lui a décoché toutes sortes de noms d’oiseaux. Omar s’est garé sur le bas-côté, il est descendu de sa camionnette. Depuis le bitume, il a dit sa façon de penser.
« La potence sur les ronds-points, j’aime pas, me dit Omar »