Les chasseurs, seule espèce protégée

Siné Mensuel – octobre 2019 – B. F. –
Chaque année ou presque, c’est la même chose : les chasseurs défouraillent sur des espèces protégées, avec la complicité de l’État. La justice condamne le gouvernement. L’Europe condamne la France. Et ça recommence… 
Le 19 septembre, Yannick Jadot d’EELV, dénonçait sur France Inter : « La justice condamne tous les ans ce gouvernement parce qu’il offre des abattages d’espèces menacées aux chasseurs. » C’est bien vrai ? Les oiseaux disparaissent en masse dans le monde ? Emmanuel Macron s’en balance, comme avant lui inénarrable Ségolène Royal, si prompte à défendre les pingouins dans l’Arctique. 
Un vol d’oies cendrées
Pour la ligue de protection des oiseaux (LPO), c’est même devenu un rituel. Le gouvernement prend un arrêté autorisant le canardage des oies cendrées au-delà du 31 janvier.  La LPO attaque cet arrêté en référé au Conseil d’État, arguant, à raison, que les oies cendrées ne peuvent être chassées au-delà de cette date pour cause de migration. Le Conseil d’État lui donne raison, casse l’arrêté gouvernemental mais, le temps que les fusils soient rangés, un paquet d’oies y sont passées. En février, Willy Schraen, le patron des chasseurs, s’est même fait un malin plaisir d’afficher sur Facebook la photo d’oies tuées. Merci au gouvernement. Et avant, Ségolène Royal, qui a inventé l’arrêté prévu pour être cassé, histoire de laisser les chasseurs s’amuser avec le gibier.
Cet été, sous l’impulsion de Sébastien Lecornu (ex-secrétaire d’État auprès de Nicolas Hulot et actuel sous-ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales), un comité d’experts de la chasse adaptative a été mis en place, composé de scientifiques et de représentants de la chasse, afin de conseiller le gouvernement sur la meilleure manière de prendre des arrêtés sans mettre en danger les espèces protégées.  Super ! Les experts ont bien travaillé et ont rendu un avis sur le courlis cendré, dont les effectifs ont décliné de 50 % en trente ans. Et que croyez-vous qu’il s’est passé ? Le gouvernement a pondu un arrêté autorisant le prélèvement de 6 000 courlis. Arrêté cassé un mois après. Et hop, rebelote !
Courlis cendré
Ironie de l’histoire : cinq jours avant, la Commission européenne avait annoncé qu’elle mettait en demeure la France pour sa chasse effrénée de l’oie cendrée. Si la France écope d’un procès, ça fera cher le cadeau électoral…
Chasser tue
« C’est rare que des non-chasseurs soient touchés. D’habitude, nous avons la bonne idée de nous tuer entre nous. Les écolos devraient être contents, on s’autorégule. » Cette belle phrase, prononcée par Guy Harlé d’Ophove (Libération, 21 août), patron de la fédération de chasse de l’Oise et président de la commission de l’environnement de la région Hauts-de-France, illustre une réalité. Depuis septembre, un chasseur a tué son père en Italie parce qu’il le prenait pour un sanglier, un autre s’est enfoncé la jambe dans la défense d’un sanglier mort et un troisième s’est tiré une balle dans le mollet. L’autorégulation, ça fait mal.
Au Maroc, des chasseurs étrangers posent devant les cadavres de centaines d’oiseaux (France24 – 21/08/2019)
Depuis une semaine, les images d’une partie de chasse, organisée dans la région de Marrakech-Safi, circulent massivement sur les réseaux sociaux marocains. On y voit une dizaine d’hommes – des touristes du Golfe – qui s’affichent fièrement à côté de centaines de cadavres de tourterelles, outrepassant les quotas fixés par la législation marocaine. Une dérive qui est loin d’être un cas isolé. 
Photo publiée le 11 août par un chasseur saoudien, sur son compte Instagram. une vidéo publiée par Extreme hunters sur sa page Instagram a également été repérée, notamment par des associations de défense des animaux marocaines et par la Coordination nationale des associations de chasses au Maroc. Là encore, on y voit des centaines d’oiseaux morts. « C’est le butin de la matinée : 1 490 tourterelles ! Que Dieu vous bénisse !« , entend-on dans la vidéo.

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