Une nouvelle affaire de chlordécone à l’île de la Réunion ?

Charlie Hebdo – 06/03/2019 – Fabrice Nicolino –

Précipitez-vous ! c’est un ordre. Je plaisante, mais je ne plaisante pas. Il faut se rendre sur le site d’Oasis Réunion : D’étonnants personnages très décidés projettent de transformer l’île de l’Océan Indien en une perle bio, débarrassées à jamais des pesticides. Je connais l’un deux, Bernard Astruc, et je puis donc vous garantir que l’objectif – 100 000 signatures en soutien – est non seulement sérieux, amis à portée de main. Je répète : il s’agit d’un plan de conversion globale de l’agriculture de la Réunion, qui en ferait un territoire libéré de l’agrochimie.

Je connais un peu ce pays lointain. et je souffre de savoir certaines choses qui n’intéressent personne. A la Réunion, près de 60 % de la surface agricole utile est vouée à la canne à sucre, plongée par ailleurs dans un chaos économique qui fait trembler les bases d’un empire sucrier comme Tereos (1). On pet légitimement parler d’une forme de monoculture. Mais pardon, cela se paie au prix fort. Quinze pesticides différents – je parle des légaux – sont épandus sur la canne à sucre locale. Parmi eux, l’inévitable Roundup, mais aussi un certain Asulox, pourtant retiré du marché européen dès 2012. Par quelle étrangeté le retrouve-t-on à la Réunion, région française sur le papier ? Eh bien, le ministère de l’Agriculture accorde chaque année une dérogation scélérate qui permet d’épandre là-bas ce qui n’est plus possible ici, en métropole. Comme pour le chlordécone aux Antilles ? Comme. A la Réunion comme à la Guadeloupe, les planteurs  réclament et obtiennent ce qu’ils veulent.

Avec quels résultats ? La presse libre de la Réunion, qui existe (2), a révélé que les autorités locales dorment à poings fermés. Pour être tranquille, on ne fait pas d’analyses de sol ni d’air. Et l’agence régionale de santé, sollicitée, assure qu’elle n’est pas compétente, non ? Avis aux médecins et aux scientifiques : il y a beaucoup de choses à découvrir. Et en attendant : oasis-reunion.bio.

(1) Le groupe Tereos s’enfonce dans le rouge au premier semestre 2018

(2)Roundup et pesticides à la Réunion: L’envers du décor